Voilà où j'en suis.
Cet été, après un stage de deux semaines dans un petit salon de thé près de chez mes parents, j'ai commencé à bosser dans un resto à Bruxelles*. C'était un monde nouveau, je stressais à mort. Qu'avais-je à offrir comme expérience? Rien. Si ce n'est l'envie d'apprendre. J'ai fais un premier essai le vendredi midi. Tout s'est bien passé, mais étant donné que les midis en semaine sont calmes, avec le recul, j'avais pas forcément beaucoup de mérite. Mon deuxième essai a eu lieu le lendemain, samedi soir. LÀ, j'ai vu ce qu'est un un coup de feu. Environ 130 couverts, à 4 en cuisine, dont moi. Après, j'étais carrément crevée. Je suis revenue travailler le dimanche, midi et soir. J'ai perdu 2kg sur le week-end. Mais plus important que la fatigue physique, les douleurs musculaires, j'étais super heureuse. Parce que j'ai fait du bon boulot. J'ai continué à travailler là, d'abord pendant 2 semaines midi et soir. Ça fait environ 60 heures par semaine. Je faisais rien d'autre que travailler et dormir. Puis seulement le service du soir, de 17h30 à minuit, 1h, 2h du matin.
Mes collègues étaient géniaux. M., le plongeur et S., le sous-chef, adorablement gentils. Le chef, avec qui j'ai eu plus de difficultés, mais qui est au final, quelqu'un de bien. D, le commis, mon instructeur. On s'est tout de suite bien entendus, presque le même âge, plusieurs points communs. Et tous les autres en salle, tous gentils et drôles. Le soir, après le service qui finissait souvent bien après minuit, on se retrouvait tous dehors, à manger sur la terrasse, à papoter et à rire.
Mais le boulot, wow! Ce qui est bien pendant les essais, surtout pour une place d'apprenti, c'est qu'on te juge surtout sur ta volonté, ta motivation, ta sociabilité. Mais après, une fois que tu as la place, on attends de toi des résultats. De la rentabilité. T'es là pour apprendre, oui, mais il faut apprendre vite. Ne pas être dans les pattes des autres. Te souvenir de tout: où sont rangées les marchandises, quelle assiette utiliser pour tel plat, comment dresser les desserts, et puis le faire vite!Le temps moyen pour dresser une Dame Blanche, c'est 1 minute. Et on parle pas de taper des boules de glaces dans une coupe avec de la chantilly et un parasol. D'abord, faut apprendre à faire de belles boules de glaces. Ensuite c'est un joli dessin sur une assiette avec du chocolat fondu, 2 biscuits sur lesquels on dépose les 2 jolies boules de glace, puis de part et d'autre on fait 2 jolis "tas" de chantilly, on ajoute une cigarette russe, sucre glace, cacao, et on envoie. Et puis si on en a 5 à sortir, plus 3 autres bons de 4 desserts chacun... Bref il s'agit pas de prendre son temps.
Malgré les difficultés, je m'en suis sortie. J'ai eu des hauts et des bas bien sûr, surtout en constatant que quand tu t'en sors bien dès le début, les attentes sont élevées. Mais il y a un moment où tes progrès stagnent un peu. Et là tu commences à t'inquiéter, les autres aussi, es-tu bien faite pour ce métier? J'ai pas peur de l'avouer, j'ai pleuré, deux fois. J'ai dû me cacher dans les toilettes pour sangloter comme une idiote. Et le lendemain j'étais là, fidèle au poste.
Ça a duré comme ça jusque début octobre. Une routine s'était installée, j'ai même pu tenir le poste toute seule quelques fois, pour que D puisse prendre congé. Avec la fin des vacances, l'affluence s'est un peu calmée. Et puis, début octobre, D s'est fait virer. Bonnes raisons ou pas, c'est pas le débat. Je me suis retrouvée seule au poste froid. Heureusement le sous chef et le chef m'ont aidée, surtout pour les mises en places. Mais j'ai vraiment galéré. J'ai repris mon horaire à 60 heures semaine. Je me suis pas posé de questions. Mais j'aurais dû. Parce que cette responsabilité j'en voulais pas. Tenir ce poste, c'est pas seulement y être pendant les services, à envoyer des plats. C'est y être avant pour mettre en place tout ce qu'on peut préparer avant le service, pour soi, mais aussi pour le chef. C'est tenir les stocks à l'oeil, savoir exactement ce qu'il reste de chaque produit, signaler au chef ce qu'il va bientôt manquer. C'est tout ranger et nettoyer à la fin du service, savoir ce qu'on a vendu. Et dans mon cas, c'était, chaque nuit, me tourner et retourner dans mon lit, à me faire la liste de ce qu'il fallait faire le lendemain, de ce que j'avais oublié, et stresser à mort. J'étais pas prête pour cette responsabilité. Ce boulot que j'adore était devenu une corvée, et je n'avais plus envie d'aller travailler le matin. Ce qui, je trouve, est super grave. Je veux me lever le matin en ayant envie d'aller travailler. C'était plus le cas.
Alors, après un mois, j'ai démissionné. Non seulement pour ça, mais aussi parce que je n'apprenais plus grand chose. En quelque sorte, j'étais devenue plus ouvrière que stagiaire.
Ça fait presque un mois maintenant. Toute l'équipe me manque beaucoup, je pense à eux tous les soirs, me demandant comment ça se passe. J'ai presque envie qu'on m'appelle pour venir donner un coup de main. Mais je dois me trouver un nouveau stage. J'avoue que je ne mets pas beaucoup d'entrain à cette recherche. Mais démissionner m'a donné un sale coup à la confiance en moi. J'aurais voulu tenir. Je le prends comme un échec personnel, et ça m'empêche d'aller de l'avant, de me présenter autre part en disant "Regardez!Je vaux quelque chose, je vous serai utile!". Je sais que j'exagère, que je suis là pour apprendre et non pour "les aider", mais je ne peux pas m'ôter ça de la tête. Enfin, aujourd'hui j'ai envoyé une candidature par mail, peut-être aurai-je le courage de téléphoner demain. Il y a quelques restaurants qui m'intéressent vraiment. Et même si j'en donne peut-être l'impression, je ne baisse pas les bras. J'ai juste besoin de me recentrer, de croire à nouveau en moi.
Cet été, après un stage de deux semaines dans un petit salon de thé près de chez mes parents, j'ai commencé à bosser dans un resto à Bruxelles*. C'était un monde nouveau, je stressais à mort. Qu'avais-je à offrir comme expérience? Rien. Si ce n'est l'envie d'apprendre. J'ai fais un premier essai le vendredi midi. Tout s'est bien passé, mais étant donné que les midis en semaine sont calmes, avec le recul, j'avais pas forcément beaucoup de mérite. Mon deuxième essai a eu lieu le lendemain, samedi soir. LÀ, j'ai vu ce qu'est un un coup de feu. Environ 130 couverts, à 4 en cuisine, dont moi. Après, j'étais carrément crevée. Je suis revenue travailler le dimanche, midi et soir. J'ai perdu 2kg sur le week-end. Mais plus important que la fatigue physique, les douleurs musculaires, j'étais super heureuse. Parce que j'ai fait du bon boulot. J'ai continué à travailler là, d'abord pendant 2 semaines midi et soir. Ça fait environ 60 heures par semaine. Je faisais rien d'autre que travailler et dormir. Puis seulement le service du soir, de 17h30 à minuit, 1h, 2h du matin.
Mes collègues étaient géniaux. M., le plongeur et S., le sous-chef, adorablement gentils. Le chef, avec qui j'ai eu plus de difficultés, mais qui est au final, quelqu'un de bien. D, le commis, mon instructeur. On s'est tout de suite bien entendus, presque le même âge, plusieurs points communs. Et tous les autres en salle, tous gentils et drôles. Le soir, après le service qui finissait souvent bien après minuit, on se retrouvait tous dehors, à manger sur la terrasse, à papoter et à rire.
Mais le boulot, wow! Ce qui est bien pendant les essais, surtout pour une place d'apprenti, c'est qu'on te juge surtout sur ta volonté, ta motivation, ta sociabilité. Mais après, une fois que tu as la place, on attends de toi des résultats. De la rentabilité. T'es là pour apprendre, oui, mais il faut apprendre vite. Ne pas être dans les pattes des autres. Te souvenir de tout: où sont rangées les marchandises, quelle assiette utiliser pour tel plat, comment dresser les desserts, et puis le faire vite!Le temps moyen pour dresser une Dame Blanche, c'est 1 minute. Et on parle pas de taper des boules de glaces dans une coupe avec de la chantilly et un parasol. D'abord, faut apprendre à faire de belles boules de glaces. Ensuite c'est un joli dessin sur une assiette avec du chocolat fondu, 2 biscuits sur lesquels on dépose les 2 jolies boules de glace, puis de part et d'autre on fait 2 jolis "tas" de chantilly, on ajoute une cigarette russe, sucre glace, cacao, et on envoie. Et puis si on en a 5 à sortir, plus 3 autres bons de 4 desserts chacun... Bref il s'agit pas de prendre son temps.
Malgré les difficultés, je m'en suis sortie. J'ai eu des hauts et des bas bien sûr, surtout en constatant que quand tu t'en sors bien dès le début, les attentes sont élevées. Mais il y a un moment où tes progrès stagnent un peu. Et là tu commences à t'inquiéter, les autres aussi, es-tu bien faite pour ce métier? J'ai pas peur de l'avouer, j'ai pleuré, deux fois. J'ai dû me cacher dans les toilettes pour sangloter comme une idiote. Et le lendemain j'étais là, fidèle au poste.
Ça a duré comme ça jusque début octobre. Une routine s'était installée, j'ai même pu tenir le poste toute seule quelques fois, pour que D puisse prendre congé. Avec la fin des vacances, l'affluence s'est un peu calmée. Et puis, début octobre, D s'est fait virer. Bonnes raisons ou pas, c'est pas le débat. Je me suis retrouvée seule au poste froid. Heureusement le sous chef et le chef m'ont aidée, surtout pour les mises en places. Mais j'ai vraiment galéré. J'ai repris mon horaire à 60 heures semaine. Je me suis pas posé de questions. Mais j'aurais dû. Parce que cette responsabilité j'en voulais pas. Tenir ce poste, c'est pas seulement y être pendant les services, à envoyer des plats. C'est y être avant pour mettre en place tout ce qu'on peut préparer avant le service, pour soi, mais aussi pour le chef. C'est tenir les stocks à l'oeil, savoir exactement ce qu'il reste de chaque produit, signaler au chef ce qu'il va bientôt manquer. C'est tout ranger et nettoyer à la fin du service, savoir ce qu'on a vendu. Et dans mon cas, c'était, chaque nuit, me tourner et retourner dans mon lit, à me faire la liste de ce qu'il fallait faire le lendemain, de ce que j'avais oublié, et stresser à mort. J'étais pas prête pour cette responsabilité. Ce boulot que j'adore était devenu une corvée, et je n'avais plus envie d'aller travailler le matin. Ce qui, je trouve, est super grave. Je veux me lever le matin en ayant envie d'aller travailler. C'était plus le cas.
Alors, après un mois, j'ai démissionné. Non seulement pour ça, mais aussi parce que je n'apprenais plus grand chose. En quelque sorte, j'étais devenue plus ouvrière que stagiaire.
Ça fait presque un mois maintenant. Toute l'équipe me manque beaucoup, je pense à eux tous les soirs, me demandant comment ça se passe. J'ai presque envie qu'on m'appelle pour venir donner un coup de main. Mais je dois me trouver un nouveau stage. J'avoue que je ne mets pas beaucoup d'entrain à cette recherche. Mais démissionner m'a donné un sale coup à la confiance en moi. J'aurais voulu tenir. Je le prends comme un échec personnel, et ça m'empêche d'aller de l'avant, de me présenter autre part en disant "Regardez!Je vaux quelque chose, je vous serai utile!". Je sais que j'exagère, que je suis là pour apprendre et non pour "les aider", mais je ne peux pas m'ôter ça de la tête. Enfin, aujourd'hui j'ai envoyé une candidature par mail, peut-être aurai-je le courage de téléphoner demain. Il y a quelques restaurants qui m'intéressent vraiment. Et même si j'en donne peut-être l'impression, je ne baisse pas les bras. J'ai juste besoin de me recentrer, de croire à nouveau en moi.
Ce que j'ai appris de tout ça:
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Un grand merci à tous ceux qui auront lu cet article fleuve en entier, vous avez du mérite!Je ne sais même pas si j'aurai le courage de tout relire!
*Je ne citerai aucun nom, je ne veux pas faire de pub (positive ou négative).
Non mais plus sérieusement, te biles pas, je penses que tu as eu raison de partir. Puis regretter les choses, c'est juste se faire chier avec un poid et surtout ça ne sert à rien ^^